« Pas d’expulsions sans relogement ? » Chiche !

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Vendredi, j’ai adressé une lettre ouverte à Christine Boutin, pour la prendre au mot. À quelques jours de la fin de la trêve hivernale, elle venait de déclarer qu’il n’y aurait pas d’expulsion locative sans solution de remplacement. S’il n’y avait pas eu tant de déclarations sur le logement sans lendemain depuis des années, ce discours aurait été plus crédible. Car ce dont les locataires expulsés ont besoin, ce ne sont pas des mots, c’est un toit !
Aussi, je lui ai présenté, dans une lettre ouverte, la situation d’une famille du centre de Paris menacée d’être mise à la rue dès lundi 16 mars. Et je lui ai demandé ce qu’elle comptait faire dans cette situation concrète.

C’est aux actes, dans les réponses apportées à des situations concrètes, qu’il sera possible de mesurer la sincérité des propos de Madame Boutin.

Pour télécharger la lettre ouverte, cliquez sur [ce lien|http://www.martinebillard-blog.org/share/minifilemanager/Ltr ouverte à C. Boutin-expulsions.pdf|fr]

NB : Pour apprécier pleinement les actes récents de Madame Boutin dans ce domaine, il faut savoir qu’elle a repoussé l’amendement suivant à son projet de loi sur le logement :
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__AMENDEMENT N° 614 présenté par Mme Billard, M. Yves Cochet, M. de Rugy et M. Mamère__

__ARTICLE 19__

”Après l’alinéa 1, insérer les deux alinéas suivants :”

”I bis.” – ”Après le premier alinéa du même article du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé” :

”Le préfet doit surseoir à l’expulsion qui aura été ordonnée judiciairement chaque fois que le locataire, répondant aux critères de l’article L. 300”-”1 du présent code, n’aura pas été relogé dans des conditions normales.”

Voici l’extrait du compte-rendu officiel de la troisième séance du jeudi 5 février 2009 :

__M le président.__ Je suis saisi d’un amendement n° 614.

La parole est à Mme Martine Billard.

__Mme Martine Billard.__ L’amendement propose que le préfet sursoie à l’expulsion qui aura été ordonnée judiciairement, chaque fois qu’un locataire répondant aux critères de l’article L. 300-1 du code de la construction et de l’habitation, c’est-à-dire reconnu prioritaire au titre de la loi DALO, parce qu’expulsé sans possibilité de relogement, n’aura pas été relogé dans des conditions normales.

Il ne s’agit pas d’interdire les expulsions, a dit tout à l’heure Étienne Pinte, mais d’éviter qu’aucune solution de remplacement ne soit proposée. Je me retrouve tout à fait dans ce propos. Je n’ai jamais déposé d’amendement visant à supprimer les expulsions. C’est l’absence de relogement qui me choque, surtout quand l’expulsion est due à un défaut de paiement du loyer, et non à des troubles de voisinage.

Il faut que le bailleur privé ou social puisse percevoir les loyers prévus dans le contrat de location. Peu lui importe, en fait, d’où vient ce paiement. Au lieu d’expulser le locataire, mieux vaudrait donc le maintenir dans le logement, grâce à un fond de solidarité qui prendra le relais, tant qu’il ne peut pas payer la totalité du loyer.

La loi DALO a apporté une petite avancée. Mais il faut qu’elle ait des conséquences. Je vous propose donc qu’un locataire reconnu prioritaire au titre de ce texte ne puisse être expulsé tant qu’un logement ne lui aura pas été proposé. Je rappelle qu’à Paris, environ cent cinquante relogements ont été effectués au titre de la loi DALO, alors qu’un nombre bien plus important de familles ont été reconnues comme répondant aux critères de ce texte, le nombre de dossier déposés étant bien plus important encore.

__M. le président.__ Quel est l’avis de la commission ?

__M. Michel Piron,__ ”rapporteur”. Il y a confusion entre le pouvoir du juge et celui du préfet. Avis défavorable.

__M. le président.__ Quel est l’avis du Gouvernement ?

__Mme Christine Boutin,__ ”ministre du logement”. Défavorable.

(L’amendement n° 614 n’est pas adopté.)


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