Pause estivale pour recomposition de la force de militantisme

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Enfin, j’ai quitté la grisaille parisienne pour le soleil du sud. J’ai la chance d’avoir cette possibilité mais j’avoue qu’après une année bien remplie et des mois de juin et juillet particulièrement pluvieux et froid, j’aspire à une seule chose : pouvoir buller et profiter du soleil.

Ce billet se contente donc de quelques points d’actualité et d’un sujet qui me tient à coeur, le Chili, et vous comprendrez en lisant pourquoi j’en parle aujourd’hui.
 »La xénophobie n’a pas de frontière »

Ces mois d’été auront vu comme hélas chaque été sous N. Sarkozy, un florilège de petites phrases sentant bon leur xénophobie et leur bêtise. L’an dernier ce sont les roms qui avaient servi de bouc émissaires. Cette fois-ci, la déclaration d’Eva Joly sur le 14 juillet, aura permis un concours de dénonciation des binationaux, ces français qui ne le seraient qu’à moitié et dont on pourrait douter de la loyauté envers leur patrie d’adoption. Après tout, lors de la dernière lecture de la loi Besson, Lionel Luca qui commence à être bien connu en tant que député de la Droite populaire, avait défendu un amendement qui prévoyait « L’acquisition de la nationalité française est subordonnée à la répudiation de toute autre nationalité ». Ce qui, outre le débat de fonds sur le sujet, est juridiquement totalement impossible car pour nombre de pays il est extrêmement difficile de renoncer à sa nationalité de naissance, ce qui est aussi le cas de la France d’ailleurs. Ayant fait cette démonstration en séance, Lionel Luca avait osé me répondre à propos de son amendement : « Il est juridiquement indéfendable, mais je le défends politiquement. »

Mais la nouveauté est que ces propos ne sont plus l’apanage de la Droite populaire ou de Guéant, Hortefeux and co. Non, c’est un véritable concours au sein de la droite à celui qui va sortir la petite phrase la plus trash. Le point Godwin est atteint à de nombreuses reprises, mais cela n’a plus rien d’étonnant. On finit par penser que l’UMP a comme conseil en communication quelqu’un venant de l’extrême-droite parce qu’oser sortir l’expression anti-France, il fallait le faire. Ils ont été tellement nombreux à y aller de leurs mots, pires les uns que les autres, que tout cela finit par donner le tournis. Ils ont même réussi à étouffer les déclarations de Marine Le Pen, tellement ils en ont rajouté. On se serait cru dans les Guignols, lorsqu’on voit PPDA renvoyer MLP parce que quelqu’un de l’UMP a dit pire qu’elle et plus vite. La réalité a dépassé la fiction.

Ce climat xénophobe se développe partout en Europe : en Hongrie, le gouvernement nationaliste en place n’hésite pas à reprendre les propositions du parti d’extrême-droite, le Jobbik, qui relève carrément du fascisme : milices en uniforme, défilés armés occupant les rues de certaines villes pour imposer la terreur aux populations roms, menaces allant jusqu’aux agressions contre ces derniers. La bête immonde serait-elle en train de renaître dans ce pays, remplaçant les juifs par les roms dans le rôle de boucs émissaires ? En tous les cas, cela fait froid dans le dos.

Pendant ce temps les institutions européennes ne disent rien, et la Pologne peut tranquillement envisager d’interdire totalement l’avortement puisque malheureusement sous la pression des courants catholiques, le traité de Lisbonne dans sa partie sur les droits fondamentaux à respecter dans l’Union Européenne, n’a pas inclus le droit à l’IVG et à la contraception. Comme toujours, les premières régressions démocratiques se font aux dépends des femmes ainsi que des populations minoritaires.

Dans ce climat bien lourd, est venu s’ajouter le massacre commis en Norvège par un admirateur de l’extrême-droite bien imprégné de racisme anti musulman. Quoi d’étonnant à ce qu’il y ait eu un fanatique plus décidé que d’autres pour passer à l’acte ? Ce qui est même étonnant, c’est qu’il n’y en ait pas plus. Heureusement en France, les armes ne sont pas accessibles facilement en vente libre. Cela nous évite peu-être le pire. Mais ce qui est incroyable c’est la timidité de la classe politique à traiter ces meurtres de crime politique, ce qu’ils sont. Le père Le Pen n’a pu s’empêcher de dire publiquement ce qu’il en pense : pour lui tout cela est secondaire, l’important c’est l’immigration. Et d’un coup, la tentative de relookage raisonnable du FN par sa fille s’est écroulé : car si le responsable n’est pas l’assassin, mais la situation, demain si un acte similaire se produit en France, Jean-Marie Le Pen expliquera-t-il que l’assassin, est certes coupable mais non responsable, selon une formule bien connue ? En tous les cas, ceux qui jouent avec le feu de la xénophobie sont responsables des conséquences que cela entraîne.

 »Pendant l’été, surtout ne pas parler de ce qui pourrait fâcher »

Entre ce crime, le Tour de France, les mondiaux de natation, les départs en vacances et quelques faits divers dont raffolent toujours autant les journaux télévisés, l’immense majorité des médias du coup n’ont pas trouvé le temps de traiter de l’affaire Takieddine révélée par Mediapart. De quoi s’agit-il ? D’un intermédiaire dans des contrats d’armement, notamment entre la France et la Libye dont on aimerait bien savoir exactement qu’elles ont été ses relations avec Nicolas Sarkozy et comment se fait-il qu’avec une fortune estimée à 100 millions d’euros dont 40 millions en France, il ne paie aucun impôt, ni sur le revenu, ni sur la fortune ? Ayant envoyé un communiqué à la presse pour annoncer
la demande d’une commission d’enquête parlementaire au nom du PG, j’ai été interviewée par l’Express.fr. Je vous mets le lien
[http://www.lexpress.fr/actualite/politique/la-situation-de-takieddine-n-entraine-aucune-reaction-c-est-inadmissible_1015924.html|http://www.lexpress.fr/actualite/politique/la-situation-de-takieddine-n-entraine-aucune-reaction-c-est-inadmissible_1015924.html|fr]

 »Au Chili, les mobilisations sont de retour »

Mais heureusement tout ne va pas mal partout. Los Indignados continuent leur mobilisation en Espagne et des centaines de milliers de personnes se sont encore réunies le week-end des 23 et 24 juillet avant d’annoncer une nouvelle journée d’action pour la rentrée.

Et puis de bonnes nouvelles viennent d’Amérique Latine : pour la première fois depuis longtemps, le Pérou vient d’élire un président de la République, Oollanta, qui a annoncé vouloir mener une politique de justice sociale. Espérons qu’il tiendra ses promesses.

Au Chili, des mobilisations, d’une ampleur sans précédent depuis la dictature, se déroulent sans discontinuer. En mai et juin d’immenses manifestations ont eu lieu dans tout le pays contre des projets d’immenses barrages hydro électriques dans le sud du pays. Ils auront comme conséquence de noyer des milliers d’hectares et le peu qui reste de forêts primaires et de chasser de leur terre ancestrale des communautés mapuche. Tout cela pour alimenter en électricité des mines du nord du pays, ce qui suppose aussi des milliers de km de lignes THT, pour des entreprises appartenant à des capitaux privés étrangers. La lutte conjugue donc défense de l’environnement, défense des droits des peuples premiers, refus de l’accaparement des terres, refus du bradage aux intérêts privés étrangers.

Puis c’est toute la jeunesse scolarisée, lycéens et étudiants, qui s’est dressée contre un système qui est parmi le plus injuste au monde et le plus cher. Ils exigent que l’éducation soit publique et gratuite, alors qu’aujourd’hui tout est payant et horriblement cher pour accéder à des établissements de bonne qualité. L’éducation a été privatisée par Pinochet et depuis le retour de la démocratie aucun des gouvernements dirigés par la Concertacion, incluant les socialistes, n’est revenu dessus. Le gouvernement actuel de Pinera (un milliardaire ultra libéral de la droite conservatrice ayant fait fortune sous Pinochet) a eu deux réponses : une répression digne de l’époque de Pinochet avec emprisonnements et retour de la torture contre les dirigeants étudiants, et un remaniement faisant justement entrer des anciens pro Pinochet dans le gouvernement ! Puis cela a été au tour des mineurs de cuivre de se mettre en grève. Ils ont assez vite obtenu la satisfaction de nombre de leurs revendications. Il faut dire que le cuivre est fondamental dans les exportations chiliennes.

Une nouvelle grève a lieu en ce moment, cette fois-ci chez Starbucks. Vous savez, cette chaîne de cafés qui se développe en ce moment en France. Au Chili, son patron refuse de négocier avec le syndicat, expliquant que les syndicats ne servent à rien. Les salariés de Starbucks n’ont pas le même avis, et pour cause : ils n’ont aucune aide pour leurs repas, ils doivent eux-même se payer leur uniforme obligatoire ainsi que les éventuels matériels de sécurité et leur salaire n’a jamais été augmenté alors que l’inflation est importante.

Pourquoi je vous parle de cette grève à l’autre bout du monde ? Les dirigeants du syndicat ont commencé une grève de la faim, il y a une semaine, or le président du syndicat est mon filleul ( sa mère, une amie était réfugiée politique en France), alors je suis inquiète.

S’il y en qui peuvent envoyer des mails de protestation contre l’attitude de la direction de Starbucks et de soutien aux salariés

Cecilia Sánchez
Directrice du Travail
csanchez@dt.cl

Ignacio Arriagada Fernandez
President de la Confedaration des Sindicats du Commerce
Mail: consfetracosi@gmail.com

Chambre de commerce du Chili
Mail: cnc@cnc.cl


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