Carte scolaire : libre choix ou faux choix ?

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Le gouvernement UMP, vient de rappeler par la voix de M.Darcos, ministre de l’Education nationale qu’il entendait mettre en œuvre le projet exprimé par Nicolas Sarkozy dès mars 2006, de “supprimer la carte scolaire” pour permettre le ” libre choix” de l’établissement par les familles.
Cette proposition s’inscrit bien dans la philosophie de la droite, d’attribuer de prétendues libertés supplémentaires, en espérant que tous les problèmes seront ainsi naturellement résolus. __Je suis pour ma part opposée à la suppression de la carte scolaire, mais favorable à des aménagements locaux et réguliers.__

Ainsi, à Paris, la carte scolaire peut être remaniée pour éviter que certaines classes ferment ou pour s’adapter aux évolutions démographiques. Cela peut être le cas pour le centre de Paris et notamment pour le 1er arrondissement qui compte moins d’enfants. Pour éviter de fermer des classes en primaire au point d’en arriver à des classes à double niveau (cela est arrivé dans le 1er). Dans le cas de nos petits arrondissements du centre, la carte scolaire peut dépasser le stricte cadre de l’arrondissement et accueillir davantage d’élèves d’autres arrondissements ou mettre en place un accueil spécifique pour les enfants ayant un handicap. C’est déjà ce qui a commencé à se mettre en place. Donc, oui, il peut y avoir des aménagements pour tenir compte des évolutions démographiques, et pour mieux assurer la mixité sociale.

Mais, sur le fond, la suppression de la carte scolaire pure et simple n’entrainera pas une plus grande liberté des familles et une meilleure efficacité de notre système éducatif :

* les écoles qui sont « renommées », et qui, à un moment donné, ont la faveur des familles informées, ne pourront pas accueillir plus d’élèves que leurs capacités. On nous parle de construire de nouvelles classes pour certaines écoles. Mais ce n’est qu’un leurre électoral, compte tenu de la taille contrainte de l’immense majorité des établissements scolaires parisiens et notamment des “plus prestigieux” qui sont aussi souvent les plus anciens et du choix fait par ailleurs par l’UMP de supprimer un départ à la retraite sur deux dans la fonction publique, et donc parmi les enseignants.
* il y aura donc des files d’attente pour les établissements bien vus, qui sélectionneront en fonction des performances des élèves ou de leur comportement : les bons établissements refuseront les candidatures des élèves considérés comme turbulents, les autres établissements prendront en charge les élèves les plus en difficulté scolaire et ceux qui sont les plus remuants dans les classes.
* le système sera difficile à gérer ; Il sera donc coûteux en argent public pour les mairies et l’Education nationale, et coûteux en temps perdu pour les familles qui devront établir des dossiers, attendre des réponses, re-établir des dossiers, re-attendre des réponses… Les familles aisées ou les classes moyennes, auront le temps de se livrer à ce petit jeu scolaire, et y ont intérêt, c’est compréhensible. Mais les familles modestes n’auront sans doute pas le temps et les connaissances suffisantes pour cela.

Au total, dans un système sans carte scolaire, la mixité sociale sort affaiblie. Toutes les études et l’analyse des expériences étrangères sont là pour le montrer. Les établissements des quartiers les plus dégradés, perdant leurs meilleurs éléments s’enfonceront dans la ghettoïsation.

Pour dire vrai, sincèrement, je ne veux pas d’un système éducatif qui renonce à offrir à tous les élèves, une école de qualité. Je sais bien que dans certains quartiers, et en banlieue parisienne surtout, si les enseignants et les parents les mieux informés fuient les ZEP, c’est bien que les conditions d’enseignement y sont effectivement moins bonnes.

A long terme, la politique efficace est de s’attaquer à l’ampleur des ségrégations urbaines et sociales. La seule manière de lutter contre les comportements compréhensibles des familles, c’est de dissiper les bonnes raisons qu’ont les familles de fuir certains établissements. Ceci implique en particulier de concentrer des moyens accrus dans les ZEP, une forte discrimination positive envers les élèves en difficulté, des aides publiques pour l’accompagnement scolaire dans les associations ou au sein même de l’école. Il existe des équipes enseignantes hyper dévouées qui dans divers établissements en ZEP font un travail fantastique pour tirer leur établissement ves le haut. Il faut en premier les aider puis étendre leur expérience à d’autres établissements.

Viser l’égale qualité de l’enseignement dans chaque établissement, c’est le seul moyen d’assurer à tous les élèves, les meilleures chances de réussite, et ce, quel que soit leur origine, leurs atouts, le contexte familial ou culturel. C’est une politique de long terme qui est à mener, et tout cela est bien loin des promesses électorales simplistes de l’UMP !


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