Remise en cause de la mixité à l’école

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Un [communiqué de la Ligue des Droits de l’Homme|http://www.ldh-france.org/actu_derniereheure.cfm?idactu=1691|fr] s’inquiète, à juste titre, de la possible remise en cause de la mixité, suite à l’adoption d’un projet de loi dont l’article 2 prévoit «  »l’organisation d’enseignements par regroupement des élèves en fonction de leur sexe » ». Les précisions ci-dessous sont aussi l’occasion de décrire comment se passe la discussion de certains textes de loi, et à quels pièges il faut être sans cesse vigilants.

Interpelée à propos de cette nouvelle mesure législative, j’ai vérifié ce qui s’était passé précisément en séance à l’Assemblée car je me souvenais que le débat avait été abordé, mais je ne me souvenais plus comment…
La commission avait adopté un amendement présenté comme rédactionnel, et dans ce cas, nous n’avons pas toujours tendance à nous méfier alors qu’en fait il s’agit de fond. En lisant cet amendement, nous nous sommes rendu compte qu’il remettait en cause la mixité. Pour cause de contrainte de procédure, il n’était plus alors possible que de sous-amender, ce que j’ai fait avec deux sous-amendements, le premier (65) supprimant la modification rédactionnelle, le deuxième (66) en essayant de limiter cette non-mixité à des enseignements précis et non à l’ensemble de l’enseignement : en bref, par exemple au sport, mais non à la totalité des cours. C’est ce sous-amendement de repli qui a été adopté par l’Assemblée. Au Sénat, les sénateurs et sénatrices recevaient un texte contenant la nouvelle rédaction, devenue un article en tant que tel, ce qui permettait de déposer des amendements de suppression. C’est ce qu’ont fait les socialistes et les communistes. Comme d’habitude le gouvernement avait déclaré l’urgence et il n’y a donc pas eu de deuxième lecture à l’Assemblée.

Plus largement, la mixité obligatoire est aujourd’hui contournée dans certaines écoles sous contrat par le fait que l’école accueille bien garçons et filles, mais dans des classes séparées.

Je copie ci-dessous le compte-rendu de la 2e séance du mardi 25 mars :

__M. le président.__ La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir les sous-amendements nos 65 et 66.

__Mme Martine Billard.__ Il arrive que des amendements rédactionnels introduisent des dispositions non prévues au départ. Le projet de loi initial prévoyait une dérogation pour organiser des enseignements non mixtes – le « des » devant être compris comme un article indéfini. L’amendement n° 7 de la commission prévoit une dérogation pour l’organisation « des enseignements » – article défini contracté signifiant « de tous les enseignements » – non mixtes, ce qui n’est pas du tout la même chose que la possibilité d’organiser certains enseignements de manière non mixte. Je ne suis pas sûre qu’il demeure beaucoup d’enseignements requérant une organisation non mixte, mais s’il en est, il importe de parler non « des enseignements », mais « d’enseignements », de sorte qu’un enseignement spécifique puisse être organisé de manière non mixte, mais non tous les enseignements. Sinon, on ouvre la porte à la possibilité de remettre en cause le principe de mixité de l’école. Soit il y a, derrière l’amendement n° 7, une volonté politique, auquel cas il faut l’expliciter, soit il ne s’agit que d’un problème de rédaction, auquel cas il faut adopter mon amendement de repli, n° 66, qui vise à substituer aux mots : « des enseignements », les mots : « d’enseignements ».

__M. le président.__ Quel est l’avis de la commission sur ces sous-amendements ?

__Mme Isabelle Vasseur, rapporteure.__ La commission a repoussé les sous-amendements nos 56 et 65. En effet, la disposition en question correspond à une exigence de la directive 2004-113. Il semble donc difficile de la supprimer. Elle permet en outre de préserver l’existence d’enseignements organisés distinctement pour les filles et pour les garçons, comme c’est le cas en matière d’éducation physique et sportive, par exemple. Quant au sous-amendement n° 66, il n’a pas été examiné par la commission, mais j’y suis favorable à titre personnel.


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