Doucement, les candidatures à l’élection présidentielle se précisent.
((/public/2017/.couverture-programme-680x1024_m.jpg|Avenir en commun|L|Avenir en commun, janv. 2017))
Aujourd’hui, avec l’annonce de 517 parrainages, Jean-Luc Mélenchon, candidat de la France Insoumise, confirme qu’il sera bien présent à l’élection présidentielle. Il y sera porteur du programme l’Avenir en commun [|https://avenirencommun.fr/|fr]. Ce programme sera complété par des livrets thématiques afin de préciser et affiner les diverses propositions.
Le livret agriculture est déjà en ligne [|https://avenirencommun.fr/livret-agriculture/|fr]. D’autres viendront compléter la partie écologie : Planification écologique et règle verte, Pour une énergie 100% renouvelable, Déchets, Forêt, Mer et pêche, Ruralité et aménagement du territoire, Transports, Eau.
Peu à peu les candidats dévoilent leurs propositions en matière d’écologie. Je vais donc les passer en revue sur ce blog dans plusieurs billets.
Aujourd’hui, je parlerai du __programme de Yannick Jadot__, candidat d’EELV. Sa candidature n’est pas assurée car il doit obtenir les 500 parrainages. Or cela va être beaucoup plus difficile qu’en 2012, notamment parce que le nombre d’élus écologistes pouvant légalement signer a beaucoup diminué (autour de 240 conseillers régionaux en 2012, une soixantaine aujourd’hui par exemple) et d’autres ont quitté EELV pour suivre De Rugy et Placé.
En attendant Y. Jadot fait campagne et hier il a présenté son programme intitulé La France vive.
Première surprise, je ne me rappelle pas qu’un programme des Verts pour une élection présidentielle ait jamais eu un titre axé autour de la France. Une telle proposition aurait vite valu à d’autres époques d’être taxé de nationaliste. En général le titre tournait plutôt autour de l’écologie. En 2012 le programme s’intitulait « Vivre mieux vers une société écologique. »
Dans la partie écologie, on retrouve évidemment beaucoup de points communs avec le programme de la France Insoumise, notamment par les références au projet Negawatt sur l’énergie ou à celui Zéro Waste sur les déchets. Mais en l’état, ce programme n’est pas très précis.
((/public/2017/planification-ecologique-regle-verte-300×297.jpg|Planif ecolo|R|Planif ecolo, janv. 2017))
Une des critiques de Yannick Jadot à JL Mélenchon est la défense de la planification écologique.
Mais il a dû faire évoluer son discours car tant Nicolas Hulot que la FNE ou bien d’autres personnes ou associations intervenant dans le champ de l’écologie, utilisent ce concept. Dorénavant son angle d’attaque consiste à dire qu’il ne veut pas d’une planification jacobine. Et il le répète régulièrement. Mais sur quoi se base-t-il pour sous-entendre ainsi que la proposition de JL Mélenchon serait jacobine ? Le seul document qui existe actuellement sur le sujet de la planification écologique est la proposition de loi que j’avais défendue à l’Assemblée nationale en 2009 et que les députés Verts avaient votée.
J’ai d’ailleurs retrouvé les traces d’un colloque qui s’est tenu en 1996 et où Alain Lipietz et Dominique Voynet avaient pris la défense de la planification « Globalisation, mondialisation, concurrence : la planification française a-t-elle encore un avenir ? » Colloque pour le Cinquantenaire du Commissariat Général du Plan, Sorbonne, 23-24 Mai. [|http://lipietz.net/spip.php?article329|fr]
Donc au lieu de répéter, comme une accusation, « planification jacobine », il ferait mieux d’attendre, d’ici quelques semaines, la publication du livret thématique Planification écologique et règle verte.
Mais ce qui est clair à la lecture de son programme, c’est la non rupture avec les politiques économiques imposées par l’Union Européenne. Certes la mesure 69 propose de »Refonder la politique commerciale de l’Union pour faire de l’Europe un vecteur de régulation publique de la mondialisation » avec »Primauté des droits humains, sociaux et de l’environnement sur les droits du commerce et des investisseurs ». Mais en attendant, face à l’urgence climatique, on fait quoi ? On subit ? On attend comme Godot que l’Union Européenne se dise bon sang mais c’est bien sûr, il faut rompre avec la concurrence libre et non faussée, pilier du traité de Lisbonne ? Ou on résiste en se dotant d’instruments au niveau français pour imposer cette primauté même si cela signifie entrer en contradiction avec l’Union européenne, ce que propose la France Insoumise avec le plan B ?
Les propositions de fiscalité visent principalement la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale, la fiscalité du patrimoine et les niches fiscales nuisibles à l’environnement et à la santé. C’est indispensable mais totalement insuffisant. Ainsi la séparation des banques d’affaires et de dépôt est absente. Surprenant. Rien concernant toutes les exonérations de cotisations sociales et le CICE. Pour le crédit recherche, il ne suffit pas de le simplifier et de le plafonner, il faut le revoir de fond en comble car actuellement il profite plus à des entreprises qui s’en servent pour augmenter la distribution de dividendes qu’à promouvoir la recherche.
Au final il n’y a pas de vraie remise en cause de la financiarisation de l’économie.
Sur la partie « institutionnelle », le programme propose d’écrire « République écologique » dans le premier article de la constitution. Donc je suppose que le début de l’article 1 deviendrait »La France est une République indivisible, laïque, démocratique, écologique et sociale ».
Je préfère la proposition de la France Insoumise qui revient à inscrire la règle verte dans la Constitution, c’est à dire l’obligation, à l’échelle de la France, de ne pas prélever sur la nature plus de ressources renouvelables que ce qu’elle peut reconstituer, ni de produire plus que ce qu’elle peut supporter.
C’est plus précis et on voit tout de suite comment cela peut être opposable par exemple au projet d’aéroport de Notre-Dame des Landes ou au projet Europa City en IDF.
L’autre proposition consiste à nommer un vice-ministre au développement durable : outre que reprendre ce concept totalement dévoyé de développement durable n’est pas terrible, mais surtout s’il n’y a pas de gouvernement écologiste, il pourra y avoir tous les vices-présidents qu’on veut, cela ne changera pas grand chose.
Enfin le Conseil économique, social et environnemental serait transformé en une troisième chambre, donc élue on suppose, avec droit de veto suspensif sur toute mesure législative qui mettrait en cause le long terme. Il suffit de renforcer la constitution sur ce sujet et revoir la composition du Conseil constitutionnel plutôt que de rajouter une chambre de plus.
Enfin en ce qui concerne les autres sujets, temps de travail, précarité, retraite, sécurité sociale, les mesures proposées sont soit floues soit inquiétantes.
Ainsi il est prévu de »Favoriser la réduction du temps de travail, sur la semaine ou sur plusieurs années » mais sans autre indication alors que dans une interview le 8 janvier Yannick Jadot s’est déclaré favorable au travail du dimanche si les salariés sont volontaires et « payés très sensiblement plus ». Pauvres camarades d’EELV qui bataillent à la mairie de Paris contre le travail du dimanche étendu par Anne Hidalgo la maire de Paris, ils vont avoir du mal maintenant.
Quant à la retraite, à part l’égalité de chacun et la garantie de l’accès de tous, on ne saura pas avec ce programme si c’est à la carte, à 60 ans ou plus tard, avec 40 ans de cotisation ou plus… Et pour les maisons de retraite, la mainmise des fonds de pension sur le secteur n’est pas remise en cause puisqu’il s’agit juste de créer autant de places en établissements publics.
Une grande absente dans ce programme, la loi El Khomri. C’est pourtant fondamental de savoir si Y. Jadot entend revenir notamment à la hiérarchie des normes telle qu’existait avant cette loi ou pas.
Un livre programme est annoncé pour février, on verra à ce moment-là si les propositions sont plus précises et quels sont les accords et désaccords. Mais on se demande bien pourquoi Yannick Jadot n’est pas reparti du programme de 2012 d’Eva Joly en le mettant à jour et en le complétant.