Des conséquences d’une grève des transports sur les votes de budget à l’Assemblée Nationale

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Dans la législature précédente 2002-2007, j’étais non inscrite. Mes possibilités d’intervenir dans les débats budgétaires en étaient d’autant plus réduites : une seule intervention autorisée. Cette année j’apprends à fonctionner dans le contexte de l’appartenance à un groupe politique. Cela donne évidemment beaucoup plus de responsabilités et notamment la nécessité que sur chaque budget, il y ait un orateur.
Dans le cadre du groupe Gauche Démocrate et Républicaine, nous ne sommes évidemment pas d’accord sur tout entre communistes et écologistes. Chacun intervient donc selon son prisme, même si à propos des budgets le vote est finalement le même. Aussi nous nous étions réparti les thématiques en fonction des dossiers plus particulièrement suivis par chaque député. Ce vendredi était si on peut dire, une journée balai : pas moins de 11 explications de vote sur des budgets examinés préalablement en commission. Mais voilà la grève des transports et l’organisation des débats sont venues modifier cette belle mécanique. En effet, difficile pour les députés de province de rallier Paris et difficile pour les franciliens d’intervenir à des moments très différents de la journée sauf à rester dans leur bureau toute la journée. Nous avons donc réparti les interventions par tranche horaire. J’ai ainsi expliqué le vote du groupe sur les dépenses du budget « Politique des territoires », intervention écrite par Yves Cochet qui n’avait pu rentrer à temps d’une réunion en province la veille au soir puis je suis passé au budget « développement et régulations économiques » qui au départ était suivi par Daniel Paul, mais j’ai laissé l’intervention sur le budget « Solidarité et insertion » à Jean-Paul Lecocq, député de Seine et Marne, car je ne pouvais plus être en séance au moment prévu.
Mais à travailler donc sur le budget j’ai appris des informations intéressantes. Ainsi même en faisant abstraction de la facture énergétique, le solde du commerce extérieur de la France est déficitaire pour la première fois depuis 15 ans, ceci par déficit d’exportations mais aussi par une hausse des importations. Et cela s’explique entre autres par le nombre insuffisant d’entreprises françaises à la bonne taille : seulement 1000 entreprises entre 250 et 2000 salariés contre 4000 en Allemagne, pays qui exporte plus que la France, mais aussi qui importe beaucoup moins.

__Explication de vote sur la Mission « Développement et régulation économiques »__

Ce budget est un budget du passé, il n’est pas à la hauteur des défis actuels.

Ainsi concernant le Développement économique et tourisme, les conséquences des évolutions environnementales sont quasiment oubliées. Quelles vont être les conséquences économiques des changements climatiques sur le tourisme compte tenu de l’importance des recettes liées à cette activité dans la balance des paiements des comptes de la nation ? A-t-on évalué l’impact économique du renchérissement structurel des prix du pétrole sur le secteur alors que l’euro fort ne suffit déjà plus à nous protéger du choc pétrolier sur le long terme ? Nous commençons à le voir et la raréfaction de la ressource n’est pas une chimère. De même, quel serait l’impact d’une taxation CO2 pour lutter contre le changement climatique sur ce secteur dont une partie significative dépend du transport aérien fortement émetteur de gaz à effet de serre. Or à aucun moment les objectifs du programme « Régulation économique » ne posent ces questions et ne proposent une politique de reconversion vers une offre différente, particulièrement dans les secteurs déjà touchés par les conséquences du réchauffement climatique (je pense ici au tourisme de neige) ou pour l’amélioration de certaines pratiques. Le ministère devrait par exemple intervenir pour mettre fin à cette aberration environnementale que sont les terrasses des cafés et restaurants chauffées en plein air !

Le parc hôtelier et l’offre touristique globale doivent être mis aux normes d’accessibilité pour les personnes handicapées. Il semblerait que cela soit envisagé avec l’aide du financement de la Caisse des dépôts et consignations. Pourquoi ne pas faire d’une pierre deux coup, en intégrant également les investissements de mise aux normes environnementales.

En même temps il est nécessaire de permettre l’accès aux vacances à tous nos concitoyens qui le souhaitent alors qu’un Français sur trois ne part pas en vacances. Or le tourisme social est le parent pauvre de l’action publique. Les dettes accumulées par l’Etat envers le secteur de la restauration-hôtellerie à caractère social sont considérables et le dispositif « chèques-vacances » exclut toujours des millions de français.

Le programme « régulation économique » enregistre une baisse tant des crédits de paiement que des autorisations d’engagement. Or il regroupe notamment les actions de protection économique et de sécurité du consommateur. Pour garantir aux consommateurs et aux professionnels la qualité des produits et services, ainsi que la sincérité des affichages d’information, il convient de doter les services de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes des moyens nécessaires. Il en va de la protection de toutes et de tous. Or, bien souvent les consommateurs victimes d’une malversation et engageant un contentieux ont l’impression d’être un pot de terre contre un pot de fer. C’est le devoir de l’Etat d’intervenir pour assurer la régulation des marchés.

Il convient aussi, et c’est le but de l’action 5, de préserver la sécurité physique et la santé du consommateur en retirant de la vente les produits dangereux. Nous connaissons les alertes sur les produits alimentaires, dictées par le principe de précaution. Elles concernent aussi d’autres produits, comme ces dernières semaines des jouets fabriqués en Chine et potentiellement dangereux.
La baisse de près de 7 millions d’euros pour l’action « protection économique du consommateur » et la baisse de près de 6 millions pour l’action « sécurité du consommateur » s’expliquerait par le regroupement des laboratoires de la DGCCRF avec ceux de la direction des douanes. Mais en page 150 du bleu budgétaire, les crédits de fonctionnement et d’investissement du service commun de laboratoires, inscrits désormais au programme 218 de la Mission « gestion et contrôle des finances publiques et des ressources humaines », s’élèvent à 5,5 millions, alors que les crédits des actions 2 et 5 sont grevés de 13 millions. Que deviennent les 7,5 millions d’euros supprimés?

Le réseau des subdivisions de la DGCCRF a déjà été drastiquement démantelé sous les précédents gouvernements UMP, mettant à mal l’action de proximité des services de cette direction. Cette nouvelle amputation est donc inquiétante tout comme l’est la stagnation des aides aux associations de soutien aux consommateurs.

Je voudrais aussi revenir sur des questions posées par notre collègue du groupe GDR Daniel Paul en commission, portant également sur la consommation, et laissées sans réponse. Qu’en est-il du décret sur la tarification sociale du gaz prévu dans le cadre de la loi sur la privatisation de GDF. Et dans le secteur postal dont l’ouverture à la concurrence a été votée au Parlement européen en juillet dernier, que devient la péréquation tarifaire?

Pour conclure, sur l’ensemble de cette « Mission développement régulation économique », je remarque que les choix anti-environnementaux du passé sont nos faiblesses d’aujourd’hui. Lors de la Commission élargie, Monsieur le ministre chargé des entreprises et du commerce extérieur a continué à nous vanter les exportations du nucléaire, alors que notre pays aurait pu au contraire être un champion des exportations de produits respectueux de l’environnement : éoliennes, panneaux photovoltaïques, « chauffe-eau » solaires, etc., ce qui éviterait d’être obligé d’en importer aujourd’hui. Notre balance commerciale s’en porterait mieux. Il y a là assurément deux choix économiques fondamentalement différents. S’agissant de « l’aide à l’innovation », confrontés à la raréfaction des ressources fossiles, il devient urgent de réserver le pétrole aux productions que nous ne savons pas substituer. Cela nécessite en même temps de développer la recherche pour anticiper la fin du pétrole comme source d’énergie et d’anticiper la reconversion des secteurs touchés.

Le Grenelle de l’environnement n’a visiblement pas impacté cette Mission « Développement économique » ce qui n’est pas si étonnant puisque dans l’architecture ministérielle le « Développement durable » relève d’un autre ministère . Il en sera ainsi tant que le développement économique ne sera pas de la compétence du ministère de l’écologie. La « révolution » écologique n’est décidément pas à l’ordre du jour.


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