Honte à Manuel Valls !

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L’offensive contre les 35 heures est relancée. On se serait attendu à ce que soit l’UMP ou le Medef qui recommence. Non, le coup est venu du côté socialiste par Manuel Valls qui, voulant faire moderne, a décidé de faire la courte échelle à la droite.

C’est un habitué des sorties droitières sur les questions de sécurité ou d’immigration. Visiblement cela ne devait plus suffire pour passer dans les médias. Il a donc enfourché un nouveau cheval de bataille : les 35 heures qui coûteraient trop cher au budget de l’État.

Bizarre, Manuel Valls est député depuis 2002, il devrait donc savoir que les exonérations de cotisations sociales (cotisations, pas charges !) sur les 35 heures ont été supprimées. Qu’il ne s’agit plus que d’exonérations en fonction du montant du salaire (jusqu’à 1,6 Smic). C’est vrai que les questions sociales et fiscales ne sont pas sa spécialité puisqu’il est membre de la commission des lois, mais quand même.

Il propose donc que les salariés ne soient plus payés en heures supplémentaires quand ils travaillent au delà de 35 heures. __En gros travailler plus pour gagner moins et s’user encore plus la santé.__
Devant les protestations, il persiste et signe : il faudrait que les salariés travaillent plus longtemps et soient mieux payés. Mais il vient de proposer de supprimer le paiement des heures supplémentaires ! Alors soit il est incohérent, soit il est incompétent, soit il n’a pas le courage de ses propres propos et il cherche à tromper ceux qui l’écoutent.

Pour lui, les 35 heures, ce serait une revendication des années 80-90. Manuel Valls visiblement ne s’est jamais intéressé à l’histoire du mouvement ouvrier sinon il saurait que la réduction du temps de travail est une revendication permanente des luttes des travailleurs depuis la fin du 19e siècle. C’est donc lui le ringard qui veut nous faire faire un bond en arrière.

Trop content d’un tel renfort inespéré, Jean-François Copé a immédiatement foncé. Quoi d’étonnant ! Alain Juppé en a rajouté. « Le vrai défi pour demain, c’est de donner au plus grand nombre les moyens et le goût de travailler plus en travaillant mieux », a-t-il osé dire.

Avec quasiment 10% de la population active au chômage, de nombreux salariés dont massivement les jeunes et les femmes subissant des emplois précaires, les plans sociaux à répétition publics ou cachés sous des formes diverses, il y a des hommes politiques pour nous expliquer qu’il faut travailler plus ! Mais de qui se moque-t-on ! Quant aux conditions de travail de nos jours avec la gestion par le stress amenant des salariés à craquer et à se suicider, comment oser parle de travailler mieux ?!

Il faudrait donc travailler plus. Mais pour quoi faire ? A-t-on besoin de produire toujours plus, des produits toujours plus de qualité médiocre pour nous obliger à les renouveler plus souvent, quand ce ne sont pas des produits nuisibles pour la santé ? A-t-on besoin, de remplacer de plus en plus les salariés par des automates, vous savez, comme au téléphone, y compris dans les institutions – taper 1 pour .., 2 pour …, de quoi avoir envie de casser le téléphone ! Et ceux qui gardent un emploi sont toujours plus pressés comme des citrons avec des salaires qui stagnent. C’est cela la modernité ? Pour moi, c’est la régression absolue. Ce qu’il faut c’est travailler moins, pour travailler tous, travailler mieux pour une production utile socialement et écologiquement supportable.

La vieille revendication du Medef ressort évidemment ! Supprimer la durée légale du travail du Code du travail et se contenter de la durée maximum fixée par les textes européens. Soit passer des 35 heures aux 48 heures !!! Sans oublier l’opt-out subi par les salariés anglais qui autorise de travailler jusqu’à 65 heures par semaine. Et comme hasard, la directive européenne sur le temps de travail revient en débat ce trimestre au Parlement européen avec la même exigence du patronat dans tous les pays : augmenter toujours plus le temps de travail autorisé.

Franchement, lorsque j’entends un homme politique qui n’a jamais travaillé de ses mains, un pur carriériste politique, venir donner des leçons de temps de travail aux salariés qui s’usent la santé dans des boulots toujours plus stressants, je n’ai qu’une proposition de sanction : 35 heures à la chaîne pendant plusieurs mois dans l’automobile, une usine de découpe de volaille, un centre d’appels, ou sur un chantier du bâtiment, en hiver ou sous la canicule, et on verrait ensuite s’il défend toujours qu’on peut travailler plus.

Des générations de travailleurs se sont battus pour la réduction du temps de travail, pour le droit au temps libéré du travail et s’affranchir au moins en partie de la subordination aux patrons, pour disposer d’une part de son temps à sa guise, pour se reposer, se divertir, se cultiver, participer à la vie associative, militer, s’occuper de sa famille…

Et il faut que ce soit un responsable du PS qui fasse ce genre de propositions ! Honte à Manuel Valls.


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