Mon intervention de 5 minutes dans le débat général sur la réforme des institutions

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Vous pouvez retrouver l’ensemble des débats, fort intéressants et ne se limitant pas à un affrontement droite-gauche, sur le site de l’assemblée nationale.

http://www.assemblee-nationale.fr/13/dossiers/reforme_5eme.asp
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, même si le complexe de supériorité hexagonal doit en souffrir, force est de constater que les institutions démocratiques de la France sont aujourd’hui en panne, notamment parce que la Constitution présidentialiste de la Ve République est à bout de souffle. Entre deux votes de lois émotionnelles ou d’opportunité, examinées comme toujours en urgence, la vie politique dérive chaque année davantage dans la « peopolisation » dictée par le système politico-médiatique et induite par la primauté de l’élection présidentielle au suffrage direct. Cette tendance s’est même renforcée depuis la regrettable inversion du calendrier électoral décidée par le gouvernement Jospin.

Comment restaurer la confiance de nos concitoyens dans le personnel politique et les institutions de la République ? Nous vivons, en effet, une crise de la représentation, avec des institutions décalées de la société. __La pratique du cumul des mandats – exception française – s’ajoutant à notre système électoral majoritaire de circonscription, la « représentation nationale » est avant tout la représentation de l’homme blanc, âgé de plus de cinquante-cinq ans, de catégorie socio-professionnelle supérieure – professions libérales, chefs d’entreprises ou cadres supérieur du public ou du privé – et exerçant déjà un mandat local.__ La loi sur la parité a peu franchi les portes de notre Parlement. Et, au manque de représentativité sociale, s’ajoute le défaut de représentativité politique, induit par le système majoritaire bipartiste.

__Dans ce contexte, il faut en finir avec la langue de bois et l’hypocrisie : cessons d’excuser l’absentéisme parlementaire qui nous déconsidère auprès de nos concitoyens__, en répétant constamment que « si nous ne sommes pas dans l’hémicycle c’est parce que nous sommes en commission ». Reconnaissons que faire fonctionner l’Assemblée sur deux jours – mardi et mercredi – à la fois pour tenir les réunions des commissions, des missions d’information, des groupes d’études, des groupes d’amitié et les débats en séance plénière, n’est pas possible.

Pour que le Parlement ait plus de pouvoirs, il faut que les parlementaires aient le temps de siéger. En n’ayant pas, nous-mêmes, le courage d’en finir avec le cumul des mandats, ni d’ailleurs de le réduire, et encore moins d’en débattre, nous ratons une occasion fantastique ; et les quelques nouvelles mesures positives proposées dans le texte continueront à se heurter à cet absentéisme.

Dans ce contexte, le projet de loi de révision constitutionnelle que vous nous soumettez est même très éloigné de certaines conclusions du comité « Balladur », dont les quelques propositions novatrices ont été, hélas, écartées par votre majorité.

Nous l’avons malheureusement compris, nos débats ne porteront toujours pas sur un projet de VIe République, parlementaire et primo-ministérielle, à l’image des démocraties modernes de nos voisins européens. Mais même dans le cadre contraint de la Ve République, les avancées sont mineures.

__Les propositions des députés Verts de rééquilibrage de nos institutions, qui sont déclinées dans les amendements déposés, s’articulent autour de deux axes principaux : une meilleure représentation de la société dans sa diversité sociale et politique ; de vrais pouvoirs au Parlement, notamment à l’opposition au sein du Parlement.__

Pour une meilleure représentation de la société, dans sa diversité sociale et politique, mon collègue Noël Mamère a cité un certain nombre de propositions comme l’introduction de la proportionnelle, le droit de vote des résidents étrangers. J’ajoute, pour ma part, le non cumul des mandats, la garantie d’une place faite à la diversité des langues régionales dans nos institutions et la modification du mode d’élection du Sénat, car en l’état, il ne permet pas aucun changement.

Il n’est plus possible que le Parlement soit considéré comme irresponsable – je rejoins Manuel Valls sur ce point – et que l’exécutif ait tous les pouvoirs. L’épisode sur le droit de résolution présenté dans le texte original du Gouvernement, supprimé par la commission au nom du risque d’irresponsabilité du Parlement, est significatif à cet égard ! Nous refusons aussi que le Président de la République puisse s’exprimer directement devant les parlementaires réunis en Congrès.

Pour donner davantage de pouvoirs au Parlement, il aurait fallu aller beaucoup plus loin, en supprimant le droit de dissolution, l’article 38 sur les ordonnances et le vote bloqué prévu à l’article 44, alinéa 3.

Pour ce qui est de l’article 49, alinéa 3, la proposition relève du tour de passe-passe : on le supprime, mais on le réintroduit, outre pour la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale, une fois par session, ce qui ne change rien par rapport à la situation actuelle, comme cela a déjà été dit.

__Quant au plein respect du droit d’amendement, le texte présenté est ambigu. Il ne faudrait pas que l’examen en séance plénière du texte amendé en commission – auquel nous sommes favorables – ne soit un prétexte pour restreindre le droit d’amendement en séance des groupes et des parlementaires.__

De ce point de vue, l’article 18 est très ambigu. Vous annoncez une loi organique sans dire en quoi elle consistera, mais dont nous pouvons penser que son objectif est la réduction du droit d’amendement des parlementaires et l’extension de la procédure des « cavaliers législatifs ».

Alors que, sur tous les bancs, nous nous plaignons de lois mal écrites, de lois bavardes, de lois modifiées tous les six mois et donc d’instabilité législative pour tous nos concitoyens, les dispositions issues du texte du Gouvernement et des amendements de la commission sur ce point risquent d’avoir pour conséquence un élargissement des pouvoirs du Gouvernement et de la majorité avec pour corollaire la restriction des pouvoirs de l’opposition. En fait de rééquilibrage, on pouvait s’attendre à mieux !

Nous sommes également favorables à la suppression de l’article 40, censé empêcher l’irresponsabilité parlementaire s’agissant des finances publiques. À voir l’ampleur des déficits alors même que cet article est appliqué, on se demande en quoi sa suppression poserait problème !

Menons les débats au fond et que le Gouvernement se prononce sur la compatibilité de tel ou tel amendement avec les dépenses publiques, mais n’empêchons pas le débat en séance publique !

Quant au recours à la déclaration d’urgence, il ne doit pas être maintenu : tant que le Gouvernement disposera de cette arme, massivement utilisée par la majorité UMP depuis 2002, le rôle du Parlement sera réduit à celui d’une chambre d’enregistrement !

Nous sommes donc favorables à un renforcement des pouvoirs de contrôle du Parlement. À l’initiative de l’opposition, et non pas uniquement de la majorité, les parlementaires pourraient créer des commissions d’enquête ou mener des auditions de membres du Gouvernement ou d’autres auditions publiques.

Voilà donc, dans leurs grandes lignes, les propositions des députés Verts. Deux sont, à nos yeux, __incontournables : l’introduction d’une dose de proportionnelle et l’instauration du droit de vote des résidents étrangers aux élections locales. Si ces dispositions ne sont pas adoptées, les députés Verts ne voteront pas ce projet de loi constitutionnelle.__


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