Mais à l’Assemblée, sous le gouvernement Sarkozy, il faut courir tout le temps.
Le trimestre se terminera dans 15 jours et j’ai un intense sentiment d’impossibilité d’arriver à bien remplir le mandat que les électeurs m’ont confié.
Elue dans une circonscription mais en même temps chargée de « faire la loi », le grand écart entre « être en circonscription » et « être à l’Assemblée » est constant.
Et en ce moment, c’est pire que tout. En effet, il suffit que N. Sarkozy ait une nouvelle idée, et toute affaire cessante le gouvernement doit présenter un nouveau projet de loi. Peu importe que le bilan des lois précédentes n’ait pas été dressé, que certaines ne soient jamais réellement entrées en vigueur faute des décrets correspondants, le vœu du président est un ordre, tout doit s’arrêter pour satisfaire son dernier caprice.
Et pour bon nombre de députés UMP, le Parlement est un boulet, avec une opposition qui ose discuter, critiquer, proposer des modifications. Tout cela prend du temps, encore que si peu, et même de moins en moins. Pour le nouveau projet de loi prétendument sur le pouvoir d’achat, on atteint le summum.
L’ordre du jour est totalement chamboulé. Une émotion chassant l’autre, le projet de loi sur l’enfermement des personnes atteintes de trouble mental, hier urgentissime, est maintenant relégué à l’arrière plan, puisque l’émotion du dernier fait divers retombé, il faut maintenant, vite, vite, vite, enrayer la chute de crédibilité du président de la République sur la question du pouvoir d’achat.
Mais voilà, il n’y a plus d’argent dans les caisses et plus d’idées à l’UMP. Qu’à cela ne tienne, le gouvernement en profite pour recycler une nouvelle fois des mesures déjà servies précédemment et au passage, il en profite pour casser un peu plus les 35 heures.
Le réveil risque d’être dur, le jour où nos concitoyens se rendront compte qu’une fois les 35 heures supprimées du Code du travail, et le travail du dimanche banalisé, il n’y aura plus de raison de leur payer des heures supplémentaires : toute heure de travail dans la limite des 48 heures hebdomadaires, y compris le dimanche, sera légale.
Nous en serons revenus à la situation vécue avant la journée de 8 heures et la journée de repos obligatoire. Il ne restera qu’à reprendre les combats qu’ont menés nos ancêtres pour tout simplement ne pas passer sa vie à la gagner, jusqu’à en mourir à la tâche.
En attendant, mon devoir de députée est de résister, mais le Parlement est tellement bafoué que même son règlement n’est plus respecté pour ce qui est du délai de dépôt des amendements.
Demain en commission, les amendements de l’opposition ne pourront être débattus réellement puisque pour respecter le règlement nous aurions dû déposer les amendements avant 17 heures aujourd’hui. Oui mais voilà, nous ne pouvons avoir le projet de loi officiel puisqu’il ne sera présenté en conseil des ministres que demain matin.
Comme nous a répondu le cabinet du ministre chargé des relations avec le Parlement : __le texte ? vous n’avez qu’à aller le chercher sur le site du journal « Les Echos »__. Les masques tombent. Le mépris de ce gouvernement pour le Parlement n’a plus de limite. Et malheureusement les députés réagissent très peu à mon goût. Je rêvais d’une protestation collective devant Matignon ou l’Elysée, des parlementaires de l’opposition ceints de leur écharpe. Mais ma révolte a rencontré peu d’échos.
Et demain les électeurs nous diront, mais qu’avez-vous fait pour nous défendre ? Les droits du Parlement, ce n’est pas seulement pour les parlementaires, c’est d’abord et surtout pour tous nos concitoyens qui ont le droit d’avoir des députés ayant les moyens de légiférer dans des conditions respectueuses de la démocratie.