La loi Chatel « concurrence au service des consommateurs »

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Ou quand un ministre oublie ce qu’il a défendu en tant que député. Le député Luc Chatel avait plutôt une bonne image pour avoir souvent pris la défense des consommateurs. Devenu secrétaire d’état dans le gouvernement actuel, il est obligé de réduire beaucoup de ses convictions sous le poids des divers lobbies.
Deux exemples dans le débat à l’occasion de cette loi : les actions de groupes et les ventes liées
 »Séances du mercredi 21 et lundi 26 novembre »

__Mme Martine Billard (groupe GDR)__. J’interviens à la suite de mes deux collègues du groupe GDR, André Chassaigne et Jacques Desallangre, pour réagir aux propos de Jean-Paul Charié. Il nous dit : ce n’est pas le moment, ce n’est pas encore au point, il faut continuer à travailler. Nous sommes étonnés, car nous nous souvenons d’une excellente proposition de loi sur le sujet, déposée par Luc Chatel. Il n’a malheureusement pas eu le choix ! Et malheureusement, aujourd’hui, il ne peut pas aller au bout de l’excellent travail qu’il avait effectué en tant que député.
Il en va de la responsabilité des députés présents d’approuver l’action de groupe. Je remarque que, parfois, les députés de la majorité UMP savent pousser leur gouvernement beaucoup plus loin qu’il ne voudrait aller. Il serait bon qu’ils ne le fassent pas seulement pour des dispositions sur l’ISF – quand il s’agit de sortir certains biens de la base de calcul de cet impôt – mais aussi pour défendre les consommateurs, avec cette fameuse action de groupe.
Le secteur des télécommunications suscite beaucoup de critiques de consommateurs, même s’il n’est pas le seul concerné. Récemment, il y a eu une « mini-émeute » devant des locaux de l’entreprise Noos. Si les clients de cette société avaient pu entreprendre une action de groupe, ils auraient bénéficié d’une défense de meilleure qualité, et ils auraient obtenu une réparation, plutôt que d’attendre pendant des semaines et des semaines de pouvoir se reconnecter.
Nos PME ne risquent rien, car ce ne sont pas elles qui sont en cause mais, le plus souvent, de grandes entreprises susceptibles de se partager un marché donné – des télécommunications ou autre. Si l’action de groupe était adoptée, les consommateurs étant en meilleure position pour se défendre, les conditions de concurrence s’amélioreraient pour eux, mais aussi pour l’ensemble des entreprises.
Nous y reviendrons lors de l’examen des autres aspects de ce texte : la concurrence peut se révéler aussi bonne pour les uns que pour les autres. Ainsi, en améliorant les conditions de concurrence, l’action de groupe pourrait peut-être permettre à des entreprises d’avoir accès à des « niches » de marché qui leur sont interdites : les consommateurs pourraient desserrer les verrous posés par les entreprises déjà installées.
Monsieur le secrétaire d’État, il y a quelques jours, vous avez annoncé, notamment devant des représentants des entreprises et des consommateurs, qu’une loi de modernisation de l’économie, déposée au printemps, comporterait des dispositions en faveur du consommateur. C’est un peu dommage de modifier des lois portant sur les mêmes thèmes, tous les six mois. Finalement, soit il fallait accepter la motion de renvoi en commission, et cela nous aurait permis d’avoir une loi complète, incluant l’action de groupe. Soit, s’il n’y a pas besoin de renvoyer en commission parce que tout est déjà parfait pour pouvoir voter cette loi, il faut accepter les amendements sur l’action de groupe.

 »Débat contre les ventes liées en micro-informatique »

++Amendement des Verts++

__Mme Martine Billard__ – L’amendement 240 traite de la vente liée, qui figure déjà dans le code du commerce, sans que les dispositions qui y sont relatives ne soient malheureusement appliquées.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez affirmé, lors de la discussion générale, qu’il était aujourd’hui possible d’acheter un ordinateur sans logiciel. Or, c’est impossible dans les établissements de la grande distribution, où le consommateur n’est pas en mesure de comparer les prix entre un ordinateur équipé et un autre qui ne le serait pas. La vente de logiciels pré-installés est une vente forcée, où la transparence des prix fait complètement défaut. En outre, si un logiciel d’exploitation est certes utile, d’autres logiciels le sont beaucoup moins, sans que le client sache combien il paie pour des outils dont il ne se servira peut-être jamais. De même, les versions des logiciels pré-installés sont souvent bridées, contrairement à celles qui sont vendues à part. Enfin, alors que les logiciels sont très chers – le logiciel Vista coûte 213 euros de plus en Europe qu’aux États-Unis –, Microsoft se permet d’équiper les ordinateurs de versions défaillantes, dont le remplacement ou la mise à jour ne sont évidemment pas gratuits.
Pour les entreprises qui souhaiteraient distribuer d’autres logiciels, se pose en outre un évident problème de concurrence. Face à cette situation, la DGCCRF ne répond pas aux plaintes, et la réunion qui devait avoir lieu sur le sujet a été annulée. Quand le consommateur pourra-t-il enfin acheter des ordinateurs non équipés sans avoir à passer par les magasins spécialisés ou Internet ?

__M. Michel Raison, rapporteur__ – Les accords d’exclusivité ne constituent pas tous des abus de position dominante. L’amendement est donc très dangereux. Avis défavorable.

__M. Luc Chatel, secrétaire d’État__ – Même avis. Le législateur s’est toujours efforcé de concilier la liberté du commerce et la défense de l’ordre public économique. Si l’amendement était adopté, un fabricant de matériel ne pourrait plus bénéficier, par exemple, de l’appui d’un distributeur pour assurer la promotion de ses produits. Le recours abusif aux accords d’exclusivité est déjà sanctionné ; la jurisprudence prend notamment en considération la situation de dépendance qui peut en résulter. Il n’est donc pas opportun de légiférer sur le sujet.

__Mme Martine Billard__ – Cette réponse ne vous fait pas honneur, Monsieur le secrétaire d’État, car il y a bien un débat de fond, que vous avez vous-même porté. Avec notre amendement, nous demandons que les accords de vente liée ne puissent avoir pour objet de limiter l’accès au marché ; tous ne sont donc pas concernés, contrairement à ce que vous prétendez.
Le consommateur doit avoir le choix, et doit pouvoir se prononcer en connaissance de cause, grâce à des prix lisibles. Les nombreuses plaintes n’avancent pas ; manifestement, la DGCCRF a reçu instruction de ne pas intervenir. Vous répétez souvent que vous êtes un libéral et que vous défendez le droit de la concurrence : trouvez-vous normal que les consommateurs n’aient aucun choix dans les enseignes de la grande distribution ?

__M. Luc Chatel, secrétaire d’État__ – Évitons de confondre concurrence et consommation. L’article 122-1 du code de la consommation interdit déjà la vente liée. Cette disposition n’est certes pas strictement appliquée par le juge, qui considère que le bon fonctionnement de l’ordinateur est primordial. Le Gouvernement a donc confié à la DGCCRF une mission d’expertise, qui est suspendue mais reprendra lorsque seront connus les résultats de l’action intentée par une association de consommateurs – soit au début de l’année prochaine. Nous verrons alors si la jurisprudence évolue. Quoi qu’il en soit, la loi en vigueur satisfait déjà votre requête !


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